Mises à part quelques exceptions prévues par le Code général de la fonction publique (Cgfp), le recrutement d’agents contractuels ne peut s’effectuer que par la voie d’un premier contrat à durée déterminée (Cdd). Toutefois, au bout de six années d’engagement sur la base de Cdd et dans les conditions prévues par le statut, la prolongation de cet engagement ne peut s’effectuer que par un contrat à durée indéterminée (Cdi).
Cependant, une décision du Conseil d’État, datée du 28 mai 2025 (1), demande au Conseil constitutionnel, par la voie d’une question prioritaire de constitutionnalité (Qpc), de statuer sur la validité juridique des conditions restrictives de « cédéisation » fixées par le Cgfp dans la fonction publique de l’État.
Les cas de recrutement direct en Cdi dans la fonction publique
Le recrutement d’une personne directement en Cdi n’est possible qu’au sein de la fonction publique de l’État (Fpe) et de la fonction publique hospitalière (Fph). Elle est exclue s’agissant de la fonction publique territoriale (Fpt).
S’agissant de la Fpe, l’alinéa 1er de l’article L. 332-4 du Cgfp indique : « Les contrats conclus en application du 1° de l’article L. 332-1 et des articles L. 332-2 et L. 332-3 peuvent l’être pour une durée indéterminé. » Ils peuvent l’être pour les motifs suivants :
- afin d’occuper un emploi dans un établissement public de l’État, sauf s’il s’agit d’un emploi devant être pourvu par un personnel de recherche ;
- pour assurer des fonctions pour lesquelles il n’existe pas de corps de fonctionnaires correspondant ;
- lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient, notamment pour assurer des fonctions nécessitant des compétences techniques spécialisées ou nouvelles ou pour pourvoir un emploi sur lequel l’administration ne dispose pas de candidature de fonctionnaire présentant l’expertise ou l’expérience professionnelle adaptée aux missions à accomplir ;
- en vue de pourvoir un emploi ne nécessitant pas une formation statutaire donnant lieu à titularisation dans un corps de fonctionnaires ;
- ou encore pour occuper un emploi à temps incomplet, n’excédant pas 70 % d’un service à temps complet.
Pour ce qui est de la Fph, l’alinéa 1er de l’article L. 332-17 du Cgfp dispose : « Les agents recrutés en application des articles L. 332-15 et L. 332-16 peuvent être engagés par des contrats à durée indéterminée ». Ils peuvent l’être pour les motifs suivants :
- lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient, notamment lorsqu’il n’existe pas de corps de fonctionnaires hospitaliers pouvant assurer les fonctions correspondantes, ou pour assurer des fonctions nouvellement prises en charge par l’administration ou nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées ;
- afin d’occuper un emploi à temps non complet d’une durée de travail inférieure à un mi-temps.
À noter que, dans toutes ces hypothèses (au sein de la Fpe, comme au sein de la Fph) ces emplois peuvent être pourvus par la voie d’un Cdd.
Les cas dans lesquels une série de Cdd peut déboucher sur un Cdi
Lorsque des contrats sont conclus pour une durée déterminée afin de pourvoir des emplois permanents (2), cette durée est au maximum de trois ans. Ils sont renouvelables par reconduction expresse dans la limite d’une durée maximale de six ans. Au terme de cette durée, la reconduction ne peut avoir lieu que par décision expresse et pour une durée indéterminée. (3).
Curieusement, les conditions de « cédéisation » ne sont pas les mêmes selon le versant de la fonction publique considéré.
S’agissant de la fonction publique d’État, la durée de six ans sur un emploi de même catégorie hiérarchique est calculée en prenant en compte les services effectués en Cdd sur un emploi permanent pour l’un des motifs identiques à ceux exigés pour être recruté en Cdi (voir ci-dessus) auxquels s’ajoutent ceux accomplis en Cdd pour assurer le remplacement momentané d’un fonctionnaire ou d’un agent contractuel à temps partiel ou en congé (de maladie, de maternité, etc.). En revanche sont exclus les services accomplis au titre de l’article L. 332-7 du Cgfp, c’est-à-dire le recrutement en Cdd d’un an pour faire face à une vacance temporaire d’emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire. C’est cette exclusion qui justifie la décision du Conseil d’État du 28 mai 2025 de saisir le Conseil constitutionnel, d’autant qu’au sein des deux autres versants de la fonction publique cette exclusion ne figure pas dans le statut.
En effet au sein de la fonction publique hospitalière, la durée de six ans sur un emploi de même catégorie hiérarchique est calculée en prenant en compte les services effectués en Cdd sur un emploi permanent pour l’un des motifs identiques à ceux exigés pour être recruté en Cdi (voir ci-dessus), auxquels s’ajoutent ceux accomplis en Cdd pour faire face à un accroissement temporaire ou saisonnier d’activité. Il s’agit là, par définition d’emplois non permanents.
Cette durée de six ans doit avoir été accomplie en totalité au sein du même établissement.
Pour ce qui est de la fonction publique hospitalière, la durée de six ans sur un emploi de même catégorie hiérarchique est calculée en prenant en compte les services effectués en Cdd sur un emploi permanent pour l’un des motifs suivants :
- assurer des fonctions pour lesquelles il n’existe pas de cadre d’emplois correspondant ;
- lorsque les besoins des services ou la nature des fonctions le justifient et qu’aucun fonctionnaire territorial n’a pu être recruté ;
- occuper un emploi dans une communes de moins de 1 000 habitants ou dans un groupement de communes regroupant moins de 15 000 habitants ;
- occuper un emploi dans une commune nouvelle issue de la fusion de communes de moins de 1 000 habitants, pendant une période de trois ans suivant sa création, prolongée, éventuellement, jusqu’au 1er renouvellement du conseil municipal suivant cette création ;
- occuper un emploi à temps non complet d’une durée de travail inférieure à un mi-temps dans une collectivité autre qu’une commune nouvelle, qu’une commune de moins de 1 000 habitants ou qu’un groupement de communes regroupant moins de 15 000 habitants ;
- occuper un emploi dans une commune de moins de 2 000 habitants ou dans un groupement de communes de moins de 10 000 habitants dont la création ou la suppression dépend de la décision d’une autorité qui s’impose à la collectivité ou à l’établissement – par exemple, emploi d’agent territorial spécialisé des écoles maternelles (Atsem) dont la création ou la suppression dépend des décisions d’ouverture ou de fermeture de classes par l’Éducation nationale ;
- ou encore occuper un emploi de secrétaire général de mairie dans une commune de moins de 2 000 habitants
Les services accomplis en Cdd pour l’un des motifs suivants sont aussi pris en compte dans le calcul de la durée de six ans nécessaire pour un passage en Cdi :
- faire face à un accroissement temporaire ou saisonnier d’activité ;
- assurer un service dans le cadre d’une mise à disposition par un centre de gestion pour remplacer des agents momentanément indisponibles, effectuer des missions temporaires, occuper un emploi vacant qui ne peut pas être immédiatement pourvu ou encore effectuer des missions permanentes à temps complet ou non complet.
Cette durée de six ans doit avoir été accomplie en totalité auprès de la même collectivité territoriale du même établissement public local.
On le voit, les conditions pour être « cédéisé » sont différentes selon le versant de la fonction publique considéré, malgré le principe d’unicité de celle-ci.
Pour autant, les règles d’accès au Cdi sont identiques :
Si l’agent atteint cette durée de services de six ans avant la fin d’un Cdd en cours, celui-ci et son employeur peuvent conclure, d’un commun accord, un Cdi.
Si l’agent décide de ne pas conclure ce nouveau contrat, il est maintenu en Cdd jusqu’à sa date de fin prévue.
Les services accomplis à temps non complet, incomplet et à temps partiel sont assimilés à du temps complet. Ceux accomplis de manière discontinue sont pris en compte, si l’interruption entre deux contrats ne dépasse pas quatre mois. Pour le calcul de cette durée d’interruption de quatre mois maximum entre deux contrats, la période de l’état d’urgence sanitaire (2020-2022) n’est pas prise en compte.
Enfin, il convient de noter que le renouvellement d’un contrat n’est pas un droit, il doit être justifié par les besoins du service.
- Conseil d’État, 28 mai 2025, Mme M., requête n° 501118.
- Hormis les cas où le contractuel remplace un agent momentanément indisponible ou afin de pourvoir des besoins temporaires sur des emplois permanents.
- Articles L. 332-4 s’agissant de la Fpe, L. 332-9 pour la Fpt, L. 332-17 en ce qui concerne la Fph.