Vu d’Europe – La tension monte à Bruxelles

Avec l’appui de l’extrême droite, Ursula von der Leyen maintient une posture partiale sur Israël et le Moyen-Orient, et détricote la réglementation écologique et sociale. Une bonne nouvelle cependant : un consensus semble possible pour légiférer sur le management algorithmique.

Publié le : 27 · 06 · 2025

Mis à jour le : 30 · 06 · 2025

Temps de lecture : 5 min

Image abstraite réalisée par Antoine Thibaudeau, mélangeant peinture acrylique, étoiles scintillantes et reflets aquatiques.

La situation est devenue très instable pour Ursula von der Leyen. Outre l’orientation qu’elle donne à la Commission, qui fait fi du traditionnel cordon sanitaire vis-à-vis de l’extrême droite, son approche partiale des attaques israéliennes sur la Palestine et l’Iran est largement condamnée.

Après la rencontre, à Bruxelles, des ministres européens des Affaires étrangères, une réunion du Conseil devait se tenir le 26 juin pour décider des suites à donner à la demande de suspension de l’accord commercial UE-Israël. Cette demande est intervenue après qu’un rapport du Service européen pour l’action extérieure (Seae) a indiqué qu’Israël pourrait manquer à ses obligations en matière de droits de l’homme au titre de l’article 2 de l’accord.

Présentés à la demande du gouvernement néerlandais, le rapport et la demande de révision sont soutenus par 17 autres États membres : Pays-Bas, Belgique, Danemark, Estonie, Finlande, France, Irlande, Luxembourg, Malte, Pologne, Portugal, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Espagne et Suède.

À l’heure où nous écrivons, les résultats de cette réunion ne sont pas connus. Mais, face à l’accumulation de preuves et à la multiplication de réactions d’indignation, il sera difficile pour la présidente de la Commission de refuser d’agir.

« Simplification » : l’acte de trop ?

En parallèle, l’adoption forcée, par Ursula von der Leyen, de mesures de « simplification » et de « compétitivité » soulève l’indignation. L’abrogation de la directive sur les « allégations vertes » (pour enrayer le greenwashing) semble être l’acte de trop pour plusieurs groupes parlementaires – Gauche, Verts, Socialists & Democrats et Renew. En imposant des changements dans la législation européenne avec l’appui de l’extrême droite, la présidente de la Commission et le Parti populaire européen (Ppe) ont sapé l’accord conclu avec ces groupes pour, il y a moins d’un an, valider son mandat. Aujourd’hui, ils menacent de bloquer toute initiative future si le Ppe et Ursula von der Leyen ne respectent pas l’accord.

Parallèlement, des rumeurs commencent à circuler selon lesquelles, sous la pression de Donald Trump, la réglementation des géants du numérique serait la prochaine cible de la présidente. De quoi faire encore monter la tension, même si certains groupes pencheraient pour un allègement de cette réglementation.

Management algorithmique : vers un consensus ?

Sur le plan réglementaire, il faut toutefois noter une nouvelle encourageante, avec la diffusion d’un projet de rapport parlementaire sur le management algorithmique. Intitulé « Recommandations à la Commission sur la numérisation, l’intelligence artificielle et le management algorithmique sur le lieu de travail — Façonner l’avenir du travail », ce texte a été examiné par Eurocadres. Il témoigne qu’une action est possible pour répondre à ce problème croissant au travail.

Une enquête de l’Ocde estime en effet que 80 % des entreprises européennes déploient déjà, dans une certaine mesure, des systèmes de management algorithmique. Avec l’utilisation de l’IA générative notamment, le principe de « contrôle humain » a été relégué au second plan, au profit des entreprises engagées dans une course débridée pour mettre en œuvre (sans surveillance) les systèmes les plus récents.

Rédigé par le Polonais Andrzej Buła (Ppe), ce rapport – bien que non juridiquement contraignant – peut peser en faveur d’une action réglementaire. Il appelle en tout cas la Commission à s’engager en ce sens. Émanant du groupe Ppe, prônant pourtant la « simplification », il est l’indice d’un possible consensus au Parlement européen sur ce sujet.

Eurocadres plaide pour une norme solide

Le rapport sera probablement examiné par la commission de l’emploi en septembre, avec une date limite indicative pour sa finalisation fixée à début 2026. Bien que son contenu soit susceptible d’être modifié, le projet actuel propose des dispositions importantes qui apporteraient davantage de transparence sur l’utilisation des systèmes algorithmiques, tout en soutenant le principe du contrôle humain au travail.

Dans le but de défendre les droits des travailleurs et le principe d’une utilisation fiable de l’IA, Eurocadres plaide activement en faveur d’une norme solide de représentation syndicale et de dialogue social, comme pilier central de l’utilisation des systèmes d’IA. Dans le même esprit, elle œuvre pour une évaluation adéquate des risques tout au long du cycle de vie des systèmes d’IA, pour en éviter les impacts négatifs.

La présidence danoise veut « une Europe forte »

Du 1er juillet au 31 décembre 2025, le Danemark assurera la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne, ce qui lui confère un pouvoir décisionnel à Bruxelles. Avec le slogan « Une Europe forte dans un monde en mutation », la présidence danoise a souligné que sa priorité absolue sera une Europe compétitive et verte.

Dans le domaine de l’emploi et de la politique sociale, Copenhague dit vouloir « soutenir une Europe plus compétitive en garantissant des marchés du travail compétitifs et offrant des conditions de travail décentes et équitables, où les emplois sont préservés et où les compétences adaptées au marché du travail de demain sont disponibles ». Le contenu de ces objectifs n’est pas détaillé.

Pour Eurocadres, deux priorités se dégagent durant cette période : poursuivre le processus de législation sur le télétravail et le droit à la déconnexion ; poursuivre les travaux, avec le Parlement européen, sur le management algorithmique. Au cours des prochains mois, nous continuerons de collaborer avec les acteurs clés de ces dossiers, en faveur des cadres.

Nayle Glaise, présidente d’Eurocadres

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