De jolis petits papiers autour des fruits de l’imagination 

À Sète, le Musée international des arts modestes met en valeur, dans l’exposition « Superbemarché », une multitude d’images imprimées à but commercial, le plus souvent anonymes, qui entourent les agrumes. Des artistes reconnus n’y sont pas indifférents.

Publié le : 30 · 05 · 2025

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Antoni Miralda, « Adn-Dna », en collaboration avec la Todolí Citrus Fundació, 2024.

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Ce n’est pas la première fois que nous évoquons l’esprit singulier du Musée international des arts modestes (Miam), créé à Sète par le peintre Hervé Di Rosa, natif de la ville, pionnier de ce que l’on nomme la figuration libre, et le collectionneur Bernard Belluc. Il y va toujours, dans cette institution délibérément différente, d’aventures singulières, menées à partir d’un regard insolite posé sur la société.

Il s’agit, cette fois, dans l’exposition « Superbemarché », de découvrir une infinité de papiers d’agrumes, papiers de soie qui font partie de la collection du Miam, riche de milliers d’exemplaires de ces parfaits exemples d’imagerie populaire, la plupart du temps à peine regardés, aussitôt froissés, jetés. N’en disent-ils pas très long, pourtant, sur le négoce mondial, d’autant plus en cette époque de guerre douanière, décrétée par le Père Ubu qui règne à la Maison Blanche ? Chemin faisant, on découvre ce que les organisateurs de l’exposition désignent comme « une mythologie moderne de l’orange ».

Figuration de l’industrie agroalimentaire globalisée

De ce fruit magique une fois pressé, le poète Francis Ponge a pu écrire : « Tandis que l’écorce seule se rétablit mollement dans sa forme grâce à son élasticité, un liquide d’ambre s’est répandu, accompagné de rafraîchissement, de parfums suaves, certes – mais souvent aussi de la conscience amère d’une expulsion prématurée de pépins. » Au Miam, c’est d’un œil un peu plus prosaïque, mais néanmoins séduit, qu’on peut suivre l’orange, depuis son origine biologique et mythique, jusqu’à sa mise en commerce universelle, via l’agriculture, le transport, la consommation.

Ces papiers de soie, les commissaires de l’exposition les définissent en ces termes : « Ces lettrages, ces signes, ces images, souvent anonymes, qui voyagent, traversent plus ou moins discrètement nos vies de consommateurs. Fuyant leur destin éphémère, certaines de ces images deviennent objets de collection. » Ne constituent-elles pas la figuration de l’industrie agroalimentaire globalisée ?

Une imagerie tissée de motifs, de souvenirs, de marques 

Côtés de cagettes d’agrumes.

L’exposition « Superbemarché » se déroule en deux parties. La première est totalement vouée aux papiers d’agrumes, tandis que la seconde, prenant du recul, prouve que cette imagerie est tissée de motifs, de souvenirs, de marques, le tout pouvant inspirer artistes et designers, de manières diverses. « Superbemarché » prouve à l’envi, une fois de plus, qu’ainsi que l’affirme Hervé Di Rosa, « Il n’y a pas d’artistes modestes, il n’y a que des collectionneurs modestes. »

Stéphane Harcourt

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