Agissement sexiste = faute grave

Le droit national interdit les agissements sexistes dans le cadre des relations de travail. Ce comportement constitue une faute grave, notamment quand il est effectué par un salarié en position hiérarchique.

Publié le : 07 · 11 · 2025

Temps de lecture : 4 min

Options - Le journal de l’Ugict-CGT

Textes

« Nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. » (Code du travail, art. L. 1142-2-1).

Ce texte constitue une transposition de la directive européenne n° 2002/73/CE du 23 septembre 2002 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre femmes et hommes en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail :

« – ‘harcèlement sexuel’ : la situation dans laquelle un comportement non désiré à connotation sexuelle, s’exprimant physiquement, verbalement ou non verbalement, survient avec pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d’une personne et, en particulier, de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. »

« 3. Le harcèlement et le harcèlement sexuel au sens de la présente directive sont considérés comme une discrimination fondée sur le sexe et sont dès lors interdits.

Le rejet de tels comportements par la personne concernée ou sa soumission à ceux-ci ne peut être utilisé pour fonder une décision affectant cette personne. »

Jurisprudence

Une décision récente de la Cour de cassation confirme la qualification de faute grave pour ces agissements.

Faits

M. [X] a été engagé en qualité de responsable d’agence à compter du 6 janvier 2014 par la société Adéquat 060, le contrat ayant par la suite été transféré à la société Adéquat 135.

Responsable régional de plusieurs agences, il a été licencié pour faute grave par lettre du 10 décembre 2019.

Procédure

Le salarié a saisi la juridiction prud’homale en contestation de cette rupture et en demande de rappel de salaire.

Pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et condamner la société au paiement de diverses sommes à titre d’indemnité de licenciement et d’indemnité compensatrice de préavis, la Cour d’appel de Caen le 28 mars 2024 retient dans son arrêt que seuls sont établis les propos sexistes tenus par le salarié, la circonstance qu’ils aient été tenus de façon répétée à l’égard de collaboratrices dont il était le supérieur hiérarchique, les rendant particulièrement fautifs, ce qui justifie le prononcé d’une mesure de licenciement, que ce grief n’empêche toutefois pas la poursuite du contrat de travail pendant le temps du préavis, étant rappelé que sur les trois griefs visés dans la lettre de licenciement pour fonder la faute grave, deux d’entre eux ne sont pas établis.

Position de la Cour de cassation, chambre sociale

La Cour de cassation se fonde sur les articles L. 1142-2-1, L. 1232-1, L. 1235-1, L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

Aux termes du premier de ces textes (L. 1142-2-1), nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

Il résulte des deuxième et troisième de ces textes (L. 1232-1, L. 1235-1) que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Il résulte des deux derniers de ces textes (L. 4121-1 et L. 4121-2) que l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs et faire cesser notamment les agissements sexistes.

La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel :

En statuant ainsi, par un motif insuffisant à lui seul à écarter la qualification de faute grave alors qu’elle avait constaté que le salarié avait tenu envers ses subordonnées, de manière répétée, des propos à connotation sexuelle, insultants et dégradants, ce qui était de nature à caractériser un comportement rendant impossible son maintien dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés (Cour de cassation, Chambre sociale, 17 septembre 2025).

À retenir :

La tenue par un salarié « de manière répétée, des propos à connotation sexuelle, insultants et dégradants » caractérise « un comportement rendant impossible son maintien dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis ».

L’employeur tenu à une obligation légale de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs ne peut laisser perdurer des agissements sexistes et doit exercer son droit disciplinaire.

Les agissements sexistes justifient un licenciement pour faute grave, sans indemnités de rupture (absence d’indemnité de licenciement et absence de préavis).

Sur la toile : MOOC Droit européen du travail (cours gratuit en ligne) (depuis le 10 novembre 2025, jusqu’au 21 décembre 2025).

Michel Chapuis

Pour aller plus loin :