Les historiennes et historiens sont parfois cruels. Certains soutiennent, par exemple, qu’entre Henry Purcell (1659-1695) et Benjamin Britten (1913-1976), la musique anglaise a traversé un vide sidéral. Et qu’avant eux, rien n’existe en dehors de John Dowland (1563-1626).
Luthiste et chanteur, il sublima la musique profane avec une foule de pièces pour son instrument et des ayres qui pouvaient ainsi être chantés en famille. Né à Londres – ou près de Dublin, selon les sources –, il passa la moitié de sa vie à l’étranger auprès d’ambassades et de cours royales. Il est d’ailleurs possible qu’il y ait effectué des missions d’espionnage… Mais ce qui fit en premier lieu sa réputation fut sa musique, qui cultivait une douce mélancolie et un équilibre parfait entre harmonie et poésie. Son premier recueil de solo songs fut réimprimé cinq fois de son vivant.
Timbre rond, généreux et émouvant
C’est à un voyage dans l’œuvre de Dowland que nous convie le couple le plus hype du moment sur la scène baroque : la mezzo-soprano Lea Desandre et le luthiste Thomas Dunford, accompagnés de l’ensemble Jupiter. S’ils ne font pas oublier Emma Kirkby ou Robert Spencer, le premier disque de leur double album recèle de jolis moments, comme Now, o now, I needs must part, qui clôt le programme.
Le deuxième disque, consacré à Purcell – le successeur spirituel de Dowland –, est plus anecdotique. La mezzo-soprano y séduit toujours par son timbre rond, généreux et émouvant, mais en rajoute malheureusement un peu trop dans les effets, comme dans le magnifique If Love a Sweet Passion (Fairy Queen). Dommage.
- Lea Desandre, Thomas Dunford, ensemble Jupiter, Dowland/Purcell. Songs of passion, 2 CD Warner Classics, 17 euros.
