Un fonctionnaire peut-il occuper un emploi dans des sociétés publiques locales ou sociétés d’économie mixte ?

Le statut général le permet, par détachement, mise à disposition ou consécutivement à une mise en disponibilité. Mais pour les emplois de direction, ce ne peut être que qu'à certaines conditions.

Publié le : 10 · 10 · 2025

Mis à jour le : 13 · 10 · 2025

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droit public

Par exception au principe général d’interdiction de prise de participation des collectivités territoriales au capital de sociétés anonymes, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent créer des sociétés d’économie mixte locales (SEML) ou prendre des participations dans ces sociétés.

Qu’est-ce qu’une SEML ?

Le régime juridique des SEML, fixé pour l’essentiel par la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983, a fait l’objet de plusieurs adaptations depuis le début des années 2000, notamment par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), par la loi n° 2001-419 du 15 mai 2001, relative aux nouvelles régulations économiques, et par la loi n° 2002-1 du 2 janvier 2002 tendant à moderniser le statut des sociétés d’économie mixte locales. Il est codifié, pour la partie législative, aux articles L. 1521-1 à L. 1525-3 du Code général des collectivités territoriales (CGCT).

Une SEML revêt la forme juridique d’une société anonyme (SA), c’est-à-dire une société dont le capital est divisé en actions et qui est constituée entre des associés qui ne supportent les pertes qu’à concurrence de leurs apports. Elle doit comprendre au moins sept associés. Son organisation et son fonctionnement doivent être conformes au droit commun des sociétés tel que défini dans le Code du commerce, étant précisé que les règles du code précité s’appliquent dans la limite des dispositions spécifiques aux SEML, contenues pour l’essentiel dans le CGCT.

Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, dans le cadre des compétences qui leurs sont reconnues par la loi, créer des SEML qui les associent à une ou plusieurs personnes privées et, éventuellement, d’autres personnes publiques pour réaliser certaines opérations.

Le champ d’intervention des SEML ne peut porter que sur les domaines suivants : aménagement, construction, exploitation de services publics à caractère industriel ou commercial (Spic), activités d’intérêt général.

Qu’est-ce qu’une SPL ?

L’article 1er de la loi n° 2010-559 du 28 mai 2010, pour le développement des sociétés publiques locales, dont les dispositions ont été codifiées sous l’article L. 1531-1 du CGCT, permet aux collectivités territoriales et à leurs groupements de créer des sociétés publiques locales (SPL) dont ils détiennent la totalité du capital.

Ces sociétés sont compétentes pour réaliser des opérations d’aménagement au sens de l’article L. 300-1 du Code de l’urbanisme, des opérations de construction ou pour exploiter des Spic ou toutes autres activités d’intérêt général. Lorsque l’objet de ces sociétés inclut plusieurs activités, celles-ci doivent être complémentaires. La réalisation de cet objet concourt à l’exercice d’au moins une compétence de chacun des actionnaires.

Ces sociétés exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres. Elles peuvent également exercer leurs activités pour le compte d’une société publique locale d’aménagement d’intérêt national sur laquelle au moins un de leurs membres exerce un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services.

Quelles sont les conditions pour qu’un fonctionnaire occupe un emploi de direction de ces sociétés ?

En premier lieu, l’article L. 123-1 du Code général de la fonction publique (CGFP) interdit aux agentes et agents publics de participer aux organes de direction de sociétés ou d’associations à but lucratif. 

Toutefois, en application respectivement des articles L. 1521-1 et L. 1531-1 du CGCT, des SEML et des SPL, qui revêtent la forme de sociétés anonymes, peuvent être créées par les collectivités territoriales et leurs groupements dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi., comme indiqué ci-dessus.

Et l’interdiction de principe, posée par l’article L. 123-1 du CGFP, ne s’applique pas en cas de désignation d’une ou un agent public, élu·e d’une commune, aux fonctions de président·e ou de PDG d’une SEML ou d’une SPL, dès lors que l’exercice de ces fonctions résulte directement du mandat électif de l’agent ou de l’agente, conformément aux dispositions des articles L. 1524-5 et L. 1531-1 du CGCT. 

Ces dispositions précisent notamment les conditions d’exercice, par les élu·es locales et locaux agissant en qualité de mandataires d’une collectivité territoriale ou d’un groupement de collectivités territoriales, de fonctions de direction au sein d’une SEML ou d’une SPL. Elles prévoient que ces représentant·es sont désigné·es par une délibération de l’assemblée de la collectivité ou du groupement actionnaire. Elles définissent également les règles applicables aux élu·es locales et locaux en matière de prévention des conflits d’intérêts et d’obligation de déport lorsqu’ils et elles participent aux organes de direction d’une SEML ou d’une SPL. Les recommandations de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) ainsi que le guide pratique à l’attention des élu·es du bloc communal « mieux gérer les risques d’atteintes à la probité », établi conjointement par l’Agence française anticorruption (Afa) et par l’Association des maires de France (AMF) et des présidents d’intercommunalité en novembre 2024 (en particulier la fiche n° 6 sur la situation de l’élu·e mandataire) rappellent ces mesures spécifiques de déport. 

En outre, la HATVP a précisé que ce régime aménagé de déport ne vaut cependant que si l’intéressé·e ne dispose pas d’un intérêt personnel au sein de l’organisme, dès lors qu’une telle situation serait de nature à générer un conflit d’intérêts justifiant la mise en œuvre de mesures de déport plus larges. En outre, les règles fixées notamment par les dispositions de l’article L. 122-1 du CGFP visent à prévenir les conflits d’intérêts susceptibles d’être rencontrés par l’agente ou l’agent public qui doit exercer, en toute circonstance, ses fonctions de manière indépendante, impartiale et objective. 

Le cas échéant, les fonctionnaires exerçant un mandat d’élu local, sur leur demande et de plein droit, peuvent bénéficier, en application du dernier alinéa de l’article 7 de la loi n° 92-108 du 3 février 1992, relative aux conditions d’exercice des mandats locaux, d’une mise en disponibilité pendant la durée de leur mandat. Les intéressé·es peuvent également, conformément à l’article L. 2123-10 du CGCT, être placé·es, à leur demande, en position de détachement pour exercer des fonctions exécutives, telles que celles de maire ou d’adjoint·e. Dans ce cas, ils et elles restent, conformément à l’article 1er de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013, relative à la transparence de la vie publique, tenu·es aux mêmes obligations déontologiques que celles qui leur incombent en qualité de fonctionnaire.

Edoardo Marquès

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